« Ouverte devant ce qui arrive, ma création tient d'abord d'une liberté totale de parcourir un espace, une surface, mais aussi, je veux toujours repousser mes limites "marcher sur les bords" et surtout éviter de devenir confortable dans mon geste. En ce sens, dessiner est une action qui m'offre une grande latitude. Tracer représente une manière résolument directe d'entrer dans la création. Le geste est simple et nécessite peu de moyens. Il implique une main qui, tenant un outil à tracer, effleure une surface en se déplaçant. Il n'y a pas de règle, pas de chemin. J'envisage l'acte comme une marche - imprévisible - de la main. Chaque trait équivaut à un pas. Le tracé est le résultat de ce parcours réalisé. Et dans cette optique, je désire explorer une pluralité de pistes, en variante le pas autant que la cadence. J'estime qu'il n'y a pas de bonnes ou de mauvaises manières de le faire, seulement l'acte et l'étonnement qu'il suscite compte. Pendant que le trait prolifère, je réagis à ce qui se produit et me laisse porter par le dessin, je déambule »
Les explorations de Julie Ouellet s'inscrivent à l'intérieur du champ élargi du dessin et de la peinture, une recherche que l'artiste considère depuis une quinzaine d'années comme non figurative et qui aborde le trait et sa propension à faire voyager et errer. Sur la surface, sans pression, sans orientation précise et sans finalité la main trace des parcours, établie des systèmes, rencontre des contraintes, effectue des détours, arrive à des culs-de-sac et revient sur ses pas. Un tracé émerge de cette trajectoire : véritables réseaux de lignes entremêlées et entassées en une masse qui semble inextricable. 
Par des expérimentations diverses, Ouellet en vient à mettre en place des situations de traçage volontairement contraignantes et imprévisibles où le travail de la main, mis sous tension, oscille entre maîtrise et dérive.
À coups de traits et de lignes l'artiste tisse une réflexion qui pose des questions sur tout ce qui s'articule autour de l'acte même de dessiner. Le geste y est «sans détour» abordé dans une approche d'investissement autoréflexive où l'attention et les énergies de l'artiste sont dirigées à produire et à réfléchir simultanément les dérives du trait dessiné et de l'esprit dans l'activité créatrice. Ainsi des questions surgissent: qu'est-ce qui dicte ou influence le parcours de la main conduite par un simple crayon? Est-ce l'oeil ou la main qui observe et tente de reproduire ce qu'il voit? Est-ce le corps qui par le ressenti s'anime et influence la motricité du geste et qui somme la main de dessiner sans relâche? 
Des expériences récentes de dessin réalisé «à partir» de la nature - sauvage - de l'île Carillon représentent un tournant pour l'artiste en faisant émerger la notion d'imprévisibilité dans sa pratique. En suivant les rythmes du paysage et de la forêt généreuse de l'île et, en partie, par un dessin réalisé in situ - le geste de dessiner se déroute, se perd, s'étonne et se relance à tout instant. 

Julie Ouellet vit et travaille à Montréal. Son travail a été présenté dans plusieurs expositions solos et collectifs à Montréal et aussi à Toronto et aux États-Unis. Ces œuvres font partie de collections prestigieuses autant publiques que privées. Elle est représentée à Montréal par la Galerie Simon Blais
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